« Ça ne peut pas être pire ».
Qu’envisagent les professionnels du tourisme ?
La présence des touristes britanniques s’étiole depuis la crise de la Covid 19. Pourtant ils représentent normalement une part significative de la clientèle en Hauts-de-France et dans l’Hexagone. Entretien avec des professionnels du tourisme inquiets du manque à gagner. Et pourtant, la France était, jusqu’à la pandémie, leur deuxième destination de prédilection après l’Espagne. Sur le sol français, quels sont les effets de l’absence des Britanniques sur les retombées économiques ? Qu’on fait les professionnels du tourisme pour rester en contact avec eux ? Quelles stratégies ont-ils mises en place ?
Une fréquentation estivale record en France par les Français
Alors que les chiffres de fréquentation touristique estivales tombent, les grands absents de ces sondages sont les Britanniques. En effet, ADN tourisme a publié dans son infographie une fréquentation record franco-française : 89 % de nos séjours sur l’hexagone cet été. On a vu le retour des Belges, des Néerlandais mais une présence insignifiante des Britanniques. Et pourtant, que ce soit en Hauts-de-France ou dans d’autres régions : l’absence se fait sentir alors que la saison hivernale pointe le bout de son nez.
Les chiffres de fréquentation des Britanniques en chute libre
Absence dans les Hauts de France
« Ça ne peut pas être pire » confie François Bergez, directeur de Somme Tourisme. En grande majorité les Britanniques puis les Canadiens, Australiens avaient l’habitude de fouler les chemins de mémoire. Ils représentaient 75 % de la clientèle jusqu’alors. Malheureusement, la clientèle française n’est pas réceptive à cette thématique pour pallier ce manque. De plus, des signaux positifs manquaient au département pour ouvrir les vannes de la communication. François Bergez confie que les Britanniques craignent de ne pas récupérer leur mise en cas d’annulation. L’été dernier, ils ont mené une campagne 100 % sérénité sur Booking Somme qui permettait l’annulation jusqu’à J-3. Les actions de promotion et marketing, que ce soit en BtoB et BtoC sont en « stand bye ». Alors que des projets notamment envers les tours opérateurs étaient au programme. Le directeur ne désespère pas de remettre la machine en route prochainement avec des événements à Londres.
Du côté de la Côte d’Opale, le ressenti est à peu près similaire. Diana Hounslow, directrice de Pas de Calais tourisme s’explique « A l’échelle du Pas-de-Calais et particulièrement sur la Côte d’Opale, la proportion de la clientèle britannique se situe aux alentours des 40% en temps normal. Leur présence est minime à ce jour »
A l’ouest comme à l’est, rien de nouveau
D’est en ouest de notre pays, c’est le même son de cloche. Particulièrement en montagne. Dans la station d’Avoriaz, les Britanniques représentent en temps normal 46 % de la clientèle étrangère. Avec la crise sanitaire, la clientèle a chuté de 96 % pour une part de marché global de 2 %. Sébastien Mérignargues est dans l’incertitude pour la saison prochaine. Quelles vont être les contraintes sanitaires pour la saison de ski s’interroge le directeur ? Il ajoute qu’il suffit de quelques signaux positifs et de répit pour que ces touristes reviennent en masse (voir l’article sur l’effet Champagne). A titre d’exemple, du 27 mars au 2 avril dernier, 1800 séjours ont été réservé par les Britanniques suite à une annonce de levée de quarantaine.
Direction l’ouest et la destination Dinan Cap Fréhel, « les Britanniques sont une clientèle historique, ils sont même nombreux à y avoir posé leur valise définitivement » annonce Dominique le Therisien, directeur de l’Office de Tourisme. Il observe toutefois une érosion structurelle de cette clientèle qui représentait de 35 à 40 % de la clientèle pour la seule ville de Dinan. La destination est touchée également par la concurrence des low cost. Le directeur déplore un manque à gagner : « les britanniques installés ici sont nombreux à avoir restauré des maisons pour accueillir leurs concitoyens. ces derniers occupaient en moyenne 80 % de leurs hébergements ».
Qu’on fait les professionnels pour entretenir le lien ?
Garder le lien à tout prix: les réseaux sociaux et la presse
Malgré ce manque en présentiel. Tous les professionnels du tourisme interrogés ont continué à sonder le marché et à rester en contact. Par le biais des réseaux sociaux notamment. Les publications sur les pages Facebook « Discover Northern France » (110 000 fans), « Great War in the Somme » ou « Visit Dinan & Northern Brittany » ont continué à leur rythme de croisière. Il fallait, coûte que coûte, maintenir le lien en adaptant le discours aux annonces sanitaires. Le taux d’engagement a d’ailleurs augmenté affirme le directeur breton, leur page compte plus de 15000 fans aujourd’hui. Le lien aussi a été maintenu au niveau des relations presse, La Somme comme le Pas de Calais entretiennent de très bonnes relations avec les journalistes britanniques ; Des articles ont été publié malgré la crise. Les événements virtuels ont aussi eu le vent en poupe.
Observation : la data au cœur de la stratégie
Du côté d’Atout France à Londres, cette pandémie a permis de se poser et de prendre du recul. « Nous avons changé de stratégie » m’explique Marine Teste « et nous avons développé des outils pour créer des rapports, nous sommes arrivés à un niveau de granularité très fin sur la connaissance de la clientèle ». Atout France Londres est dans une logique de « test & learn ». Ils informent les régions françaises de certaines opportunités. A noter par exemple, l’opportunité de communiquer sur la détaxe, Les Britanniques gagneront 20% en pouvoir d’achat.
Cet été Atout France s’est engagé dans une campagne « Ce qui compte vraiment » à destination de la clientèle européenne co-construite avec les treize CRT. Toutefois, ce système de « start & go » permet à la représentation londonienne de déclencher des campagnes à courte échéance. Elle fonde ses espoirs sur l’arrière saison et la saison hivernale. Sébastien Merignargues à Avoriaz est dans le même état d’esprit, des hypothèses sont échafaudés et ils sont prêts à appuyer sur le bouton : relations presse, campagnes de communication sponsorisés, actions commerciales avec les tours opérateurs… Tout est prévu.
Quels sont les nouveaux besoins exprimés par la clientèle britannique ?
Sébastien Merignargues confirme que la réassurance fut d’abord sanitaire, elle est maintenant financière. Les visiteurs souhaitent savoir s’ils seront remboursés en cas de restrictions. L’aspect sanitaire aujourd’hui lui semble moins prégnant avec la vaccination en masse. Cela dit, le CRT Rhône Alpes opte lui pour un tourisme bienveillant qui fait la part belle à l’outdoor, l’itinérance et la montagne. Elle se traduit notamment par la mise en place d’un numéro vert. Celui-ci a pour but d’apporter des recommandations par des professionnels de la santé pour répondre aux besoins des clients qui souhaitent prendre soin de leur santé et de leur bien-être.
Du côté du Pas de Calais, ce sont les garanties et informations utiles qui sont au cœur des préoccupations. Un changement de comportement a été observé : une demande axée davantage sur les activités en extérieur comme la randonnée et le cyclotourisme. Et une tendance au tourisme responsable renforcée. Pas de Calais tourisme en a profité pour travailler sur un nouveau site Internet pour y apporter du contenu adapté et « Bristih frienldy ». Le site sera en ligne quand les britanniques pourront revenir. L’agence se donne le temps de le peaufiner, la campagne de communication sera lancée au moment de la mise en ligne.
Quelle stratégie mettre en place ?
La clientèle britannique manque à la France et il suffit de quelques signaux positifs pour que cette clientèle réserve dans l’hexagone. Les professionnels du tourisme souhaitent avec impatience mener des actions vers ce marché. Néanmoins, cette crise a permis de mettre en lumière des bonnes pratiques du côté des professionnels du tourisme:
- Une observation affinée pour une meilleure connaissance du marché
- Des liens maintenus et jamais rompus
- Une anticipation des besoins et un travail d’information et d’observation, d’accompagnement même.
- Une anticipation sur des offres adaptées avec un contenu en anglais impeccable précise Diana Hounslow, notre directrice franco-britannique. En effet, j’ajouterai qu’observer les requêtes en ligne, s’appuyer sur des outils de référencement naturel permet d’anticiper les contenus et les tendances que les Britanniques attendent. Une veille de la presse et des articles publiés par les journalistes tourisme est un axe à envisager. A ce propos, n’hésitez pas à glaner mes conseils sur votre stratégie digitale : rédaction, pourquoi faire appel à un natif et 5 conseils pour réussir son site Internet multilingue.
- Ainsi, les professionnels du tourisme seront prêts au moment voulu. Ils ne manquent plus que les signaux essentiels, les « core vitals » pour paraphraser le leader des moteurs de recherche en ligne. Cette pandémie a appris aux professionnels à devenir de plus en plus agile dans leur communication.
- Les tendances de tourisme responsable et les activités de plein air s’observent pour la clientèle britannique comme pour la française. Cette tendance de tourisme durable et responsable est sur la table des professionnels du tourisme depuis de nombreuses années… Rien de surprenant.
Pour conclure: êtes vous prêt ?
En conclusion, les Britanniques sont aujourd’hui moins contraints à voyager en France. Depuis le 8 août, ils peuvent y séjourner sans devoir respecter une quarantaine à leur retour. Ceci dit, la France reste classée en pays ambre, cela implique de réaliser un test PCR de retour au pays. Un budget d’environ 400 £ pour une famille de 4 personnes. Aujourd’hui, les écoliers ont repris le chemin de l’école en Grande-Bretagne. Il reste à espérer que la situation sanitaire s’améliore et que ces familles pensent à la France pour leur « half term » (équivalent à nos vacances de la Toussaint). En cette arrière-saison, je conseillerai aux professionnels de concentrer leurs efforts sur les séniors, ces « empty nesters » (couples déchargés de leurs obligations financières vis-à-vis de leurs enfants) ayant un pouvoir d’achat plus conséquent. Les baby-boomers représentent en effet à eux seuls la plus grande richesse du pays. « Ok boomers, come-back please » pourrait-il devenir le nouveau slogan ?
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